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Le Wargame

Des origines au jeu d’échec

L’invention du plus ancien « wargame » connu est attribuée à Sun Tsu (sixième siècle avant JC), auteur de l’Art de le Guerre. Le Whei Hai repose sur le principe simple de l’encerclement des pièces adverses comme le jeu de Go.

Le chaturanga, l’ancêtre des échecs ?

Ancêtre lointain des échecs, le chaturanga est un jeu de guerre indien inventé entre les Ve et Vie siècle en Inde. Le terme apparaît dans de nombreux textes anciens : le Livre des Hymnes, le Rig Veda ou encore dans le Mahabharata et le Ramayana. Formé des deux racines sanskrites – chatur, « quatre », et anga, « membre » – il signifie littéralement « ayant quatre membres » ou « quadripartite ». Cet adjectif qualifie les armées typiques de l’Inde ancienne, composées de « quatre corps d’armée » distincts, que l’on retrouve dans le jeu : chars de combat, cavalerie, corps des éléphants, infanterie, sous les ordres d’un Rajah.

Le jeu comme incarnation d’une guerre de conquête

À cette époque, l’Inde se trouve éclatée en de nombreuses principautés rivales qui luttent entre elles pour unifier le royaume. Le jeu d’échec primitif est la transposition de ces guerres intestines, et il se présente vraisemblablement comme une guerre de conquête.
Il oppose quatre adversaires disposant chacun d’une armée de huit pièces : un roi, à la tête des quatre corps de l’armée indienne traditionnelle – l’éléphant, le cavalier et le char à l’arrière-garde ; quatre fantassins en première ligne.
Le jeu se pratique alors avec deux dés et laisse au hasard le choix des pièces à déplacer. Celles-ci se prennent les unes les autres. Le char traverse en ligne dans toutes les directions. L’éléphant avance de deux cases en diagonale. Le cavalier saute à droite et à gauche. Le pion se déplace case à case, promu en pièce majeure s’il atteint la dernière rangée opposée. Des alliances tactiques peuvent être nouées entre adversaires. Mais lorsqu’un joueur prend un roi rival, il annexe alors les pièces restantes aux siennes. La partie s’achève après que sont capturées les dernières pièces. Un décompte de points correspond au nombre et à la valeur des prises. S’il y a enjeu d’argent, les sommes sont réparties au prorata.

C’est avec l’abandon du hasard que le jeu d’échec suit sa propre voie. Les Perses font évoluer la forme de ce jeu vers celle du jeu d’échecs que nous connaissons, codifié définitivement pendant la Renaissance.

Le jeu avec figurines

Les plus anciennes figurines datent de 1000 ans avant JC : un char de Mésopotamie tiré par un attelage de bœufs et des soldats découverts à Rosseg en Carinthie. Au début du XVIIème siècle, des armées princières existent dans la plupart des cours européennes. Elles servent à la fois le jeu et l’éducation des jeunes princes. La fabrication reste longtemps artisanale mais une évolution importante se produit dans ce domaine avec l’apparition des figurines dites de Nuremberg. Produites en grande quantité, elles sont plates, en étain ou en plomb. Les allemands en garde le monopole jusqu’au milieu du XIXème siècle. Avec l’instauration du drill par Frédéric le Grand, de nombreux officiers sont encouragés à s’exercer avec des figurines avant de le faire sur le terrain. Les guerres napoléoniennes suscitent des vocations nationales. Les français choisissent la ronde bosse qui représente une finesse de détail accrue. Les anglais se lancent dans cette activité vers la fin du XIXème siècle. La fabrication des célèbres Britains en 54mm commence à cette époque et se poursuit de nos jours. Les joueurs décident entre eux des règles employées. Le premier jeu est celui de Robert Louis Stevenson, inventé en 1881 et diffusé en dehors du cercle de ses intimes en 1898.

Le Kriegspiel

La généralisation des armes à feu et une approche plus scientifique de la guerre amènent de nouveaux outils, les échecs de guerre :

Le koenigspiel ou jeu du roi, est inventé par Christopher Weikhmann en 1664 ; l’échiquier est de plus grande taille et chaque camp compte trente pièces aux capacités de mouvement différentes (roi, maréchal, colonel, capitaine, lieutenants, hérauts, courriers).

En 1780 Helwig introduit les concepts d’agrégation, de représentation du terrain et d’arbitrage. L’échiquier compte 1666 cases avec des couleurs pour les paysages, 120 pièces par camps (infanterie, cavalerie…), 200 pièces pour les fortifications.

En 1797, Ceorg Venturini fait évoluer les règles. 3600 cases codées pou représenter le terrain réel (zone frontalière entre France et Belgique), 1800 brigades d’infanterie et de cavalerie, 800 batteries d’artillerie. Le système de règle devient plus complexe.

Avec la généralisation des cartes, l’échiquier est abandonné et le kriegspiel fait son apparition. Au XVIIIème siècle Reisswitz alors conseiller à la cour prussienne, utilise un terrain sablonneux et des éléments de décor. Les règles sont organisées et écrites. Dès 1828 Von Molkte devient un pratiquant assidu du kriegspiel et le diffuse dans l’armée prussienne puis allemande. Le kriegspiel sert à la fois pour le développement et l’entraînement de l’armée mais aussi pour planifier les opérations lors de la guerre de 1866 contre l’Autriche puis celle de 1870-1871contre la France.

Application du kriegspiel

Première guerre mondiale : Le plan Schlieffen fait l’objet de nombreuses séances d’entraînement. La réalité du terrain est différente. Cependant les scénarios à l’Est sont confirmés par la victoire de Tannenberg.

Avec le traité de Versailles les états major développent l’emploi du kriegspiel en incorporant les aspects diplomatiques et politiques. Cette pratique s’intensifie dans les années trente avec l’emploi de l’interopérabilité entre la Heer, la Luftwaffe et la Kriegsmarine.

Seconde Guerre mondiale : les offensives des trois premières années font l’objet d’une préparation intensive qui explique le bon déroulement des combats.

Le wargame aux états unis

Le « naval war college » en 1884 s’intéresse au wargame. La première séance est conduite en 1887 et cette pratique est intégrée dans le cursus des étudiants dès 1894. En 1897 Théodore Roosevelt, alors assistant au secrétaire à la Marine, assiste à une séance stratégique. La simulation a pour thème l’affrontement entre escadre. Les tirs et les torpillages sont résolus avec des jets de dés et des tableaux de probabilité. La première guerre mondiale est l’occasion d’intégrer les données de combat avec l’adoption d’une table de dommages différenciées pour chaque classe de bâtiments et l’intégration de sous marin.

Le wargame est utilisé entre les deux guerres et élabore la nouvelle stratégie dans le conflit futur avec le Japon. Ses séances mettent en avant de nouvelles dispositions opérationnelles avec l’emploi de portes avions (construit dès 1920), le rôle décisif de l’aviation par petit groupes, la guerre d’usure, le débarquement des marines.

Le wargame sert à l’entraînement et à la prospective. Pendant la guerre les américains appliquent les plans et les tactiques préétablis. Les séances suivantes sont exécutées en terme d’opération logistique en correspondance correspond à la stratégie de saturation par les moyens matériels.

L’utilisation du wargame s’essouffle avec la stratégie nucléaire. Le retour aux conflits conventionnels engageant des forces armées réactualise le wargame notamment avec des moyens informatiques.

Le wargame commercial

Le premier wargame commercial connu est celui d’HG WELLS. “Little Wars” est conçu avec des règles et des soldats en plomb. En 1953 Charles S. Roberts développe le jeu « Tactics » dont le thème est l’affrontement entre des superpuissances. Ce thème correspond à l’époque de la guerre froide. Ce marché connaît une expansion dans les années 70 et au début des années 80.

La bonne simulation du processus décisionnel et les coûts réduits du wargame commercial ont attiré l’attention des militaires. Un département wargame est créé en 1981 au « Army war college ». Le concepteur du wargame « Gulf Strike » fut embauché comme consultant le jour de l’invasion du Koweit.

Ce résumé sur le wargame est tiré d’un article de Champ de Bataille Thématique, et l’auteur est Jean Philippe Liardet, docteur en histoire militaire, thèse sur le wargame avec le soutien de la Direction Générale de l’Armement.

Une réponse à Le Wargame

  • Le Pelican dit :

    « Il ne manque donc plus que le hasard pour faire de la guerre un jeu, et c’est là qu’il est le plus fréquent »
    Carl von Clausewitz